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Parfois (souvent) perdue...
16 décembre 2011

Les joies de l'allaitement

On nous dit beaucoup de choses sur l'allaitement pendant la préparation pré-natale :

- c'est ce qu'il y a de meilleur pour le bébé

- ça lui apportera tous nos anti-corps, et il sera moins malade

- avec de bonnes positions, on peut éviter d'avoir mal au dos

- les massages du sein permettent de favoriser la lactation

- bébé se régule tout seul, il prend ce dont il a besoin et réclame uniquement quand il a faim

- si des crevasses apparaissent, il faut varier les positions de bébé et appliquer de la crème après chaque tétée

- ça crée un lien magnifique entre bébé et sa maman...

Je pense que tout ça est vrai, j'en suis même convaincue. Mais il y a aussi beaucoup de choses dont on ne m'a parlé, et que j'ai découvert sur le tas...

Il s'agit bien sûr de mon expérience personnelle, et j'imagine que toutes les mamans vivent ça différemment. Mais moi ce que j'ai ressenti pendant l'allaitement, c'est que ça fait mal, très mal ! Alors oui, je me tartinais les bouts de seins avec la crème, oui, je changeais de position à chaque fois, mais je devais mal m'y prendre parce que Aïe!

Et quelle angoisse de ne pas savoir si Pikpuce avait assez mangé...! Bien-sûr je lui faisais confiance pour prendre la quantité qu'il lui fallait, mais ce qu'elle aimait, elle, c'est boire un ptit peu, un ptit verre, mais très souvent... Alors je veux bien donner à manger à la demande, mais quand on a à peine 1 heure pour souffler entre chaque tétée, c'est pas possible! Au final on a réussi à se réguler toutes les deux, elle a mangé de plus grandes quantités, mais à chaque fois j'avais peur qu'elle ne réclame à nouveau 2 heures après. 

Quant au lien qui se crée entre elle et moi... sincèrement j'en ai plutôt souffert. Parce qu'elle me prenait pour un biberon sur pattes. Je ne pouvais jamais juste la prendre dans mes bras, pour un câlin, sans qu'elle se torde dans tous les sens, la bouche ouverte, pour chercher le sein. Les seuls contacts qu'on a donc eu les premières semaines, c'est au moment de ses repas. J'aurais tellement aimé partager autre chose avec elle, des caresses, des regards... mais non. Pour elle j'étais celle qui donne à manger, c'est tout. Je comprends que c'est un lien très fort, très animal et que ce besoin vital qu'elle avait de moi est certainement ce lien magique dont on nous parlait, mais je n'étais pas préparée à ce qu'elle me renvoie cette image de moi. Et je lui en ai voulu, terriblement...

Enfin, je n'étais pas préparée non plus au jugement des autres. Le personnel médical que j'ai rencontré était bien formé à ne pas porter de jugement. Mais ça se voyait comme le nez au milieu de la figure :

- Le pédiatre : Comment ça se passe l'allaitement?

- Moi : Ben, pour elle ça va, elle mange bien, elle tète bien. Mais pour moi c'est dur...

- Vous avez de la crème?

- Oui, oui j'en ai. C'est vrai que j'ai des grosses crevasses, ça fait vraiment mal. Et puis c'est angoissant aussi.

- Il faut changer de sein à chaque tétée, et essayer d'autres positions : le ballon de rugby vous avez essayé?

- Heu, non, j'y arrive pas. Mais j'ai tout le temps peur qu'elle ne mange pas assez...

- Il faut donner à la demande.

- Oui, je sais. Mais je pense que je voudrais commencer le sevrage...

- Votre fille a 6 semaines? Il faudrait continuer encore un peu. Je vous fais une ordonnance pour le Lansinoh.

Et mon angoisse, alors? Tu l'entends dans ma voix que j'ai peur, que j'ai une boule dans le ventre à chaque fois qu'elle pleure parce j'en ai marre d'avoir mal partout,parce que je suis crevée à force de me relever toutes les 2 heures la nuit... Tu comprends que depuis deux semaines je pleure en même temps qu'elle tète, parce que j'en peux plus? Je sais, toutes les mamans passent par là, mais je suis pas toutes les mamans, je suis moi, toute seule, et je craque là!

Et il y a le jugement, jamais énoncé, de la famille, des amis et surtout du papa. Lui, il avait une idée très "romantisée" de sa femme en train d'allaiter son bébé, une belle image d'Epinal. Il a eu beaucoup de mal à comprendre mon malaise. Je pense que comme les médecins, il comprenait les douleurs physiques, même s'il ne pouvait pas se représenter exactement ce qu'elles étaient. Mais la souffrance psychologique, il n'arrivait pas à l'accepter. Et comme les médecins, il m'a dit, avec beaucoup de tendresse, "c'est ce qu'il y a de mieux pour elle, il faudrait que tu continues encore".

Merci pour la culpabilisation! Et ce qu'il y a de mieux pour moi?? Je veux bien faire des sacrifices pour ma fille, mais je ne peux pas me résoudre à m'effacer complètement. Je ne suis pas qu'une maman, je ne suis pas que deux seins gonflés, plein de vergetures, douloureux, à disposition 24h/24 de ce petit être. Je suis aussi une femme, qui aimerait pouvoir se regarder dans la glace sans pleurer...

Pour lui c'était un abandon, un aveu d'échec de vouloir arrêter l'allaitement. "Mais on avait décidé de l'allaiter, on ne peut pas abandonner maintenant, même si c'est dur. Ça va aller mieux, il faut s'accorcher". On remarquera l'utilisation du pronom "on". Oui, c'est vrai qu'on a pris la décision ensemble, pendant la grossesse. Mais c'est moi toute seule qui souffre maintenant. Je lui ai proposé de passer 24h à mon rythme : se lever en même temps que moi pendant la nuit, rester assis sans bouger pendant 3/4 d'heure, malgré les crampes, malgré l'envie d'aller aux toilettes, et se tirer sur les tétons pendant tout ce temps. Et ça 8 fois par jour. Bizarrement il ne l'a jamais fait...

 

Au final, j'aurais presqu'envie de dire "heureusement", un petit problème de santé (sans lien avec l'allaitement) m'a plus ou moins obligée à passer au biberon, au bout de 7 semaines. Quel soulagement! Mais encore aujourd'hui, quand on me pose la question : "Tu l'allaites?", je me cache derrière cette raison médicale pour expliquer que non, je ne l'allaite plus. Comme si c'était honteux d'avouer que ça a été une expérience très dure pour moi.

L'avantage c'est que maintenant je sais. Je sais que pour moi l'allaitement peut être traumatisant, psychologiquement épuisant. Ce sera peut-être différent avec un prochain bébé. Je pense que j'essaierai de nouveau, mais que je ne me culpabiliserai pas si je décide d'arrêter, même si c'est seulement après 15 jours. Après tout ce qu'il y a de mieux pour un bébé, c'est que sa mère soit reposée, sereine et sans rancoeur, non?

 

 

 

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